INTRODUCTION
(suite)
II. - CADRE GEOLOGIQUE
REGIONAL (cf.
fig. 2)
La mer Egée,
dans sa configuration actuelle, résulte de la dislocation par failles et de
l'effondrement partiel, à la suite de contraintes extensives récentes (néotectonique),
de tout un domaine compris entre la Grèce continentale, la Crète et l'Anatolie
("Egéide", S. DÜRR, 1980) qui avait été préalablement tectonisé
en plusieurs phases (tectonique tangentielle), parfois dès le Jurassique supérieur
(zones paléogéographiques internes), avec l'ensemble de l'arc dinaro-taurique.
La néotectonique a déterminé
dans les parties médianes et externes du domaine égéen un dispositif d'arc
insulaire, se composant d'un arc externe, non volcanique (depuis les îles
Ioniennes jusqu'à Rhodes en passant par la Crète), d'un arc interne à
volcanisme calco-alcalin, distant de quelque 200 km du précédent (Egine, Milos,
Thira, Nisyros), et de fosses. Ce dispositif (arc égéen) est lié à un mécanisme
de subduction de la plaque africaine sous la plaque continentale égéenne (J.
ANGELIER, 1977).
De la tectonique alpine résulte, comme en Grèce continentale, en
Crète ou dans les Taurides, un édifice de nappes empilées. Mais, du fait du
morcellement, et sans doute de variations longitudinales, il est très difficile
de suivre d'une rive à l'autre de l'Egée les zones paléogéographiques définies
sur le continent. Chaque île ne montre en effet qu'une petite partie de l'édifice,
deux îles pourtant voisines pouvant en représenter éventuellement deux
niveaux très différents.
Amorgos,
au cœur de l'Egéide, est l'un de ces lambeaux témoins dont nous tenterons de
trouver la signification paléogéographique et structurale. Sa position
actuelle est très particulière: elle se trouve en effet à la lisière méridionale
du massif dit d'Attique-Cyclades, caractérisé par un métamorphisme haute
pression-basse température de l'Eocène, tandis qu'au Sud affleurent des
terrains appartenant aux unités externes non métamorphiques, notamment
Tripolitza à Astypalea.
Le massif d'Attique-Cyclades correspond à des séries de lithologies
variées, riches en marbres et métamorphisées dans le faciès "schistes
bleus", considérées par certains auteurs comme appartenant à un vieux
socle hercynien ou plus ancien, mais dont l'âge est plus vraisemblablement mésozoïque
(et tertiaire) (découverte de fossiles triasiques dans les marbres de Naxos,
P.K. NEGRIS, 1914, puis S. DÜRR & E. FLÜGEL, 1978, et d'une algue
jurassico-crétacée à Agrilos, au Sud de Naxos, S. DÜRR et al., 1978).
Du point de vue de la tectonique alpine, ce massif cristallin a une
indubitable position "en fenêtre" sous les unités pélagoniennes (M.
BONNEAU et al., 1978) , ainsi que l'a montré G. KATSIKATSOS (1971) en
Eubée. Mais sa signification paléogéographique est encore discutée. Pour M.
BONNEAU et al. (1978), "les Cyclades appartiendraient au moins en
partie aux zones helléniques internes et sembleraient charriées sur les zones
externes représentées par les îles méridionales d'Amorgos et d'Astypalea".
S. DÜRR (1980) souligne le "cachet" externe (séries de type plate
forme) de certaines parties d'Eubée et des Cyclades (Almyropotamos, Naxos,
etc.).
Au voisinage d'Amorgos, le massif d'Attique-Cyclades est représenté par
les îles Naxos (pro parte), Ios, et une partie de l'archipel au Sud-Est
de Naxos (Erimonisia): Agrilos, Iraklia, Schinoussa, Kouphonisia. Les îlots Kéros
et Antikeri ont été envisagés par S. DÜRR et al. (1978) comme des
reliques de la nappe pélagonienne structuralement sus-jacente, métamorphisées
dans un faciès de haute température, avec intrusions granitiques.
Vers le Sud, Thira (Santorin), jalon de l'arc interne égéen, est
constituée en majeure partie de volcanites récentes, mais on y trouve deux
affleurements réduits de marbres et de grès faiblement métamorphisés; dans
les marbres ont été découverts des microfossiles du Tertaire ancien (M.C.
BLAKE et al., 1981).
Dans l'île d'Anaphi affleurent des roches sédimentaires métamorphisées,
dont un flysch daté de l'Eocène (N. MELIDONIS, 1963), ainsi que des plutonites
cénozoïques (S. DÜRR et al., 1978).
Astypalea, la plus occidentale des îles du Dodécanèse, montre dans ses
deux unités tectoniques beaucoup d'affinités avec la série de Tripolitza (G.
CHRISTODOULOU, 1967; S. LEONTARIS, 1973), avec notamment un flysch concordant débutant
à l'Eocène supérieur, et une tectonique comparable à celle du Péloponnèse
(P. MARNELIS & M. BONNEAU, 1977).
Enfin vers l'Est, se pose le problème de la jonction avec l'édifice
taurique, qui comprend un niveau structural inférieur représenté par le
Complexe du Menderes, surmonté par différentes nappes (nappes lyciennes).
Le Complexe cristallin du Menderes est constitué d'un noyau de
micaschistes, de paragneiss et d'anatexites, entouré d'une enveloppe inférieure,
métamorphique, d'origine détritique, et d'une enveloppe supérieure carbonatée,
également métamorphisée, renfermant des bauxites, dans laquelle ont été
trouvés des fossiles triasiques et des Rudistes (S. DÜRR, 1975). Cette dernière
enveloppe forme une unité désignée comme "Massif du Menderes s. str."
par S. DÜRR et al. (1978). Elle est surmontée en certains endroits par
des schistes à chlorite et
muscovite pouvant être interprétés comme un métaflysch.
Pour S. DÜRR (1980), le "Massif du Menderes s. str.",
unité de type plate forme apparaissant en fenêtre sous les unités supérieures,
appartient indiscutablement aux zones externes et représente un équivalent
structural et paléogéographique de l'Olympe thessalien.
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