Tectonique
(suite)
III.-
CONCLUSIONS ET CORRELATIONS
Ainsi dans l'île d'Amorgos nous avons reconnu plusieurs phases de déformation
successives, toutes postérieures à l'Eocène moyen (niveau le plus élevé qui
soit daté de manière à peu près certaine), et peut-être même à l'Eocène
supérieur, voire un certain niveau de l'Oligocène (âges possibles de la fin
du dépôt du flysch):
- une première phase de plissement Φ1 de direction d'axe
B1, voisine de N 160 (déversement ouest), associée à une
schistosité S1 synmétamorphe et une linéation d'allongement
L1 subparallèle à B1;
- deux phases de plissement Φ2 et Φ2',
associées à des schistosités de fracture S2 et S2',
dont les directions sont N 40-60 et N 100-120 (vergences respectives: Nord-Ouest
et Sud-Sud-Ouest ?);
- une phase cisaillante tangentielle Φ3, de direction
d'axe inconnue, ayant déterminé plusieurs chevauchements (écaillages) au sein
de la série;
- une phase tardive de plissement Φ4
(plis presque droits), de direction N 60, sans schistosité associée;
- une phase Φ5 de bombement à grand rayon de courbure;
- une phase cassante, néotectonique.
Des plis couchés de première phase tectonique ont été décrits en de
nombreux points du domaine égéen, notamment
dans les Cyclades:
- Naxos (M. BONNEAU & al., 1978), direction N 10, avec métamorphisme
HP-BT associé;
- Sikinos (J. GEYSSANT & C. LEPVRIER, 1979), de direction N-S, avec métamorphisme
HP-BT associé;
- Syros (M. BONNEAU & al., 1980), direction N 60-70, avec métamorphisme
HP-BT associé;
- Siphnos (T. GOURNELLOS, 1980), direction N 30-50 (?), avec métamorphisme
HP-BT associé;
- Paros (D. PAPANIKOLAOU, 1977), direction N-S.
On voit que les directions correspondantes sont assez dispersées et
qu'aucune ne coïncide avec la direction de B1 déterminée à
Amorgos (même compte tenu de l'expansion mio-plio-quaternaire de la région égéenne,
J. ANGELIER & X. LE PICHON, 1980), bien que les directions des plis couchés
des premières phases à Paros, à Sikinos et même à Naxos, s'en rapprochent
sensiblement (~N-S).
Par ailleurs, les datations du métamorphisme associé à ces premières
phases ont fourni les résultats suivants:
45 MA à Naxos (P.A.M. ANDRIESSEN & al., 1979)
42 MA à Siphnos (R. ALTHERR & al., 1976)
40-50 MA Syros (M. BONNEAU &
al., 1980).
Ces phases semblent donc s'être produites au plus tard à l'Eocène supérieur
(au Lutétien à Naxos). Ce fait paraît exclure une corrélation avec la phase
Φ1 d'Amorgos, postérieure à l'Eocène moyen et
vraisemblablement à l'Eocène supérieur.
Les directions des plis I de Naxos sont aussi approximativement celles
des premières phases affectant toutes les zones charriées en Crète, et en
particulier la nappe des phyllades (M. BONNEAU & al., 1978). Par
contre, dans la série de l'Ida, qui y représente l'autochtone relatif ionien,
les directions de plis couchés de
première phase, d'âge post-Oligocène inférieur (M. BONNEAU, 1981), sont
Est-Ouest, avec déversement vers le Sud (M. BONNEAU, 1976, 1977). Dans
l'enveloppe supérieure du Menderes, en Turquie, ont été décrits également
des plis couchés de première phase, mais leur direction est
Ouest-Nord-Ouest - Est-Sud-Est (S. DÜRR, 1975).
Ainsi la série de l'Ida, comme l'enveloppe supérieure du massif du
Menderes, qui nous ont paru présenter des ressemblances lithologiques assez
marquées avec l'île d'Amorgos, se rapprochent aussi de celle-ci par le style
de leurs premiers plis, mais s'en différencient par leurs directions.
Dans l'île d'Astypalea, voisine d'Amorgos, aux confins occidentaux du
Dodécanèse, et dont l'appartenance à la zone du Gavrovo-Tripolitza a été démontrée
(P. MARNELIS & M. BONNEAU, 1977), existent des plis de première phase, d'âge
post-Eocène supérieur, qui dans les calcaires ont des directions sensiblement
NNW-SSE; il s'agit de plis isoclinaux, non couchés, simplement plus ou moins déversés
vers l'Ouest. Leur style est certes différent de la phase Φ1 d'Amorgos,
mais leurs directions sont très voisines et leur vergence identique. Dans le
flysch d'Astypalea, les plis ont une direction un peu différente (N-S) et sont
associés à une schistosité de fracture.
Par ailleurs, la même île d'Astypalea fut le siège d'une seconde
phase, cisaillante, responsable de la superposition tectonique des deux unités
qui la constituent et de la formation de microplis d'axe E-W dans le flysch;
cette phase pourrait être liée à la phase cisaillante tangentielle Φ3
reconnue à Amorgos, et qui y détermine plusieurs chevauchements.
Malheureusement nous n'y avons pas mis en évidence de stries de glissement ni
de plis associés qui auraient pu indiquer sa direction et permettre éventuellement
une corrélation plus sûre.
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